« Quiconque cite l’auteur d’une parole amène la délivrance dans le monde.«
Citation talmudique
Quand Emil rencontre Albert..
Lui ! il disait toujours tout haut à qui voulait bien l’entendre : « il n’y a pas d’espoir de vivre sans désespoir de vivre…, il n’y a pas d’espoir de vivre sans désespoir de vivre… , il n’y a pas d’espoir de vivre sans désespoir de vivre… ».
Et l’autre lui répondait doucement, calmement : « cesse donc d’être cet écorché, cet homme révolté… La vie est ainsi faite, elle n’a que des inconvénients. Elle n’est d’ailleurs qu’inconvénients, douleurs et frustrations avec parfois quelques embellies passagères, le temps d’un sourire, d’une amourette ou d’un désir de soir d’été quand là-haut, tout là-haut au firmament des soupirs, nous tutoyons l’éternité et les dieux… ».
Lui reprenait alors – toujours aussi passionnément : « oui mais le désespoir dans tout cela ? Le désespoir d’une vie est lourd à porter, tellement lourd qu’il peut mener tout droit à la mort, délivrance ultime des uns, drame pour les autres … » Et de rajouter aussitôt : « Mais si la seule solution est la mort, nous ne sommes pas sur la bonne voie. La bonne voie est celle qui mène à la vie, au soleil. On ne peut avoir froid sans cesse… »
Et l’autre – toujours aussi calmement, imperturbable – de reprendre en lui affirmant : « tu me connais, je suis un grand pessimiste ou un optimiste qui s’ignore – il faut voir. Et je suis assez d’accord avec toi lorsque tu dis si justement que la bonne voie est celle qui mène à la vie et que l’on ne peut avoir froid sans cesse. Mais la mort n’est peut-être pas ce froid dont tu parles. En effet, si la mort n’avait que des côtés négatifs, mourir serait un acte impraticable. Alors, à quoi bon vivre quand on sait que la fin est inéluctable ?».
Lui : « Et l’amour dans tout cela ? L’amour, ce parfum parfois sauvage qui exalte la vie. L’amour, ce doux sentiment qui pimente notre destin et vient éveiller nos nuits d’une lueur nouvelle. Que fais-tu de l’amour ? Un monde sans amour est-il possible ? Que ce monde sans amour était comme un monde mort et qu’il vient toujours une heure où on se lasse des prisons, du travail et du courage pour réclamer le visage d’un être et le coeur émerveillé de la tendresse. Un monde sans amour est impossible !!! »
L’autre : « Que dire ? Que te répondre ? Simplement ceci : « Heureux en amour, Adam nous eût épargné l’Histoire… »
* Les phrases en italiques sont des citations d’Emil Cioran et d’Albert Camus
John Ibonoco
“He who reports a saying in the name of its author brings deliverance to the world. »
Talmudic quote
When Emil meets Albert…
He always said out loud to anyone who would listen: « there is no hope of living without despair of living…, there is no hope of living without despair of living… There is no hope of living without despair of living… ».
And the other answered him gently, calmly: « stop being this flayed, this revolted man… Life is like that, it has only disadvantages. It is only inconveniences, pains and frustrations with sometimes some temporary embellishments, the time of a smile, a love affair or a desire of summer evening when up there, all up there in the firmament of the sighs, we are close to eternity and the gods… « .
He then took up again – always so passionately: « yes but what about despair in all this? The despair of a life is heavy to bear, so heavy that it can lead straight to death, ultimate deliverance for some, drama for others… « . And to add immediately: « But if the only solution is death, we are not on the right track. The right path is the one that leads to life, to the sun. You can’t be cold all the time… ».
And the other – always so calmly, unperturbed – to resume by affirming to him: « you know me, I am a great pessimist or an optimist who ignores himself – it is as you wantr. And I quite agree with you when you say so rightly that the right way is the way to life and that one cannot be cold all the time. But death may not be the cold you speak of. Indeed, if death had only negative sides, dying would be an impractical act. So what is the point of living when you know that the end is inevitable?
He: « And what about love in all this? Love, that sometimes wild perfume that exalts life. Love, this sweet feeling that spices up our destiny and awakens our nights with a new light. What do you do with love? Is a world without love possible? That this world without love was like a dead world and that there always comes an hour when we get tired of prisons, work and courage to claim the face of a being and the wondering heart of tenderness. A world without love is impossible!!! »
The other: « What to say? What can I say to you? Simply this: « Happy in love, Adam would have spared us the History… »
* Les phrases en italiques sont des citations d’Emil Cioran et d’Albert Camus
John Ibonoco
Bah tout ce que je peux rajouter à ces deux visions existentialistes de la vie, c’est l’absence criante de transcendance. De la même manière qu’il y a un bien et un mal sur terre ( l’amour et la mort)
Les espaces inconnus de nous pourraient bien être séparés aussi ( paradis enfer) tout en restant liés pour toujours . Mais les deux interlocuteurs n’en veulent rien comprendre ou pense l’avoir compris .
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Que dire de plus ? En tous cas, une réflexion qui prend en compte ce qui dépasse l’homme ?
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Ce qui dépasse l’homme? Camus comme Cioran n’y croyaient pas, hormis bien sûr les forces naturelles. Ce sont des génies de l’immanence pure. Des existentialistes qui ont cru pouvoir se passer de forces divines, de la foi, etc…Même pas des agnostiques, des athées convaincus plaçant le hasard de nos vies sans aucun sens au dessus de tout. Comment peut-on ensuite, malgré la beauté de leur écriture, dire qu’ils dépassent l’homme par leur réflexion? Je dirais plutôt qu’ils dépassent la grande majorité du commun des penseurs et des politiciens ça oui. J’adore Camus. C’est une forme christique de l’athéisme. Magnifique! Camus, c’est le désir de dépasser les paradigmes vrai ou faux/ bon ou mauvais/ guerre ou paix/ c’est l’idée force que la révolution passe par l’intérieur de nous-mêmes; qu’il n’y a pas un camp des oppresseurs et des oppressés. Il n’a pas voulu s’engager pour l’indépendance de l’Algérie paradoxalement non par ce qu’il était de droite, mais parce qu’il se sentais algérien français, qu’il voulait briser le mur entre musulmans et chrétiens , pas les séparer. Il renie toute forme de violence, même si elle s’exerce pour « la bonne cause » Il manque à la France un penseur comme lui, faisant la part des choses du cœur et de l’esprit, sans trancher, toujours dans le compromis. Plus de terrorisme religieux et politique. Mais du respect, du rapprochement mutuel, du dialogue permanent (comme le préconisait le grand Malek Chebel). Car chaque jour suffit sa peine et chacun doit faire son examen de conscience. Les algériens ne lui ont pas pardonné. Pas tous dieu merci. A l’école on doit le réhabiliter. C’est une urgence civile! C’est l’amour de la vie qui doit l’emporter sur la haine et les rancœurs de chacun. C’est ça Camus, me semble-t-il. Paix sur lui, et Cioran, ce déiste un peu fou, qui voyait dieu comme un pervers. Une autre manière d’être matérialiste, mais dans l’abandon total de la transcendance et des questions de l’au-delà, qui n’amènent que le sadisme de l’être surnaturel.
Bonne journée.
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Merci de votre commentaire. Camus et Cioran sont pour moi deux auteurs à rencontrer au moins une fois dans sa vie.
Quant à la question de l’immanence, de la transcendance, de l’existentialisme, des générations entières d’élèves ont été traumatisées par ces questions philosophiques ; même remarque pour les philosophes, de Socrate à aujourd’hui, des empiristes et rationalistes en passant par le positivisme. Et effectivement, comme vous l’avez si justement dit : » C’est l’amour de la vie qui doit l’emporter sur la haine et les rancœurs de chacun. » Et comme disait Camus : « Il n’y a pas d’amour de vivre sans désespoir de vivre. » Et je trouve cette remarque très juste.
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Mais que penser du désespoir ? Kierkegaard en a fait une philosophie en soi. N’est-il pas lui aussi dépendant de l’espoir? Qui a surgit le premier ? Qui est le socle de l’autre?
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Confère Camus précité
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