(Réédition)
« Anorexie, manque d’appétit, perte d’appétit, perte du goût des bonnes choses de la table et des bons moments – tous assis ensemble à discuter fermement ou à se couper la parole – , fixer son attention sur les petits bouts de gras de sa tranche de jambon qui ne pèse pas bien lourd, jouer avec sa nourriture dans son assiette pendant plus d’une heure avant de la repousser comme rassasié de l’avoir trop vue ou sentie… Perdre le goût des aliments et de la vie, perdre lentement mais sûrement du poids puis perdre l’envie de voir les autres pour glisser doucement, tout doucement vers une fin qui se profile à l’horizon… Anorexie j’aurai ta peau ! «
John Ibonoco
MA FAIM
Elle ne veut plus manger.
Un jour, comme ça, par petits morceaux de nourriture, elle a fait le tri dans sa vie comme dans son assiette, comme un reflet d’elle-même déformé, renvoyé par le blanc de l’émail et qui lui murmure les secrets de son âme, ceux qui lui font mal, ceux qui l’abîment, ceux qui la torturent…
Elle ne veut plus manger et ça la préoccupe.
A table, elle fronce les sourcils, serre les mâchoires et ferme son sourire pour ne laisser filtrer qu’un air lointain, un air d’ailleurs comme si l’important n‘était plus le plaisir de l’instant, celui de partager, d’échanger, de sourire et de rire. La mélodie dans son coeur a changé de tonalité. Elle veut manger, se nourrir et survivre mais n’y arrive plus. Son estomac devenu trop étroit n’en peut plus de ce régime qui le maltraite, alors il est en grève. Il fixe ses conditions et n’acceptera peut-être pas un retour en arrière, un retour vers un plaisir de la table où il faisait bon parler, boire un verre, et goûter à tous ces plats préparés qui sentaient si bon la cuisine familiale.
Elle ne veut plus manger mais l’espoir est là, bien là, en elle.
Comme le cancre de Prévert :
« Elle dit non avec la tête
Elle dit oui avec le coeur
mais elle ne dit pas encore tout à fait oui à ce qu’elle aime
…elle est debout, toujours debout !
et sur le tableau noir de son malheur
avec sa petite main d’adulte encore enfant
elle cherche à dessiner maladroitement le visage du bonheur. »
Pour Pauline...
John Ibonoco
« Anorexia, lack of appetite, loss of appetite, loss of taste for the good things at the table and the good times – all sitting together talking firmly or interrupting each other’s speech – , fixing one’s attention on the little bits of fat in one’s slice of ham that doesn’t weigh much, playing with one’s food on one’s plate for more than an hour before pushing it away as if satiated from having seen or smelled it too much… Losing the taste for food and life, slowly but surely losing weight and then losing the desire to see others to slide slowly, very slowly, towards an end that is looming on the horizon? Anorexia I’ll have your skin! «
John Ibonoco
MY HUNGER
She doesn’t want to eat anymore.
One day, just like that, by small pieces of food, she sorted through her life as if it were on her plate, like a deformed reflection of herself sent back by the white of the enamel, whispering to her the secrets of her soul, those that hurt her, those that damage her, those that torture her…
She doesn’t want to eat anymore and she’s worried about it.
At the table, she frowns, clenches her jaws and closes her smile to let only a distant air filter through, an air from elsewhere, as if the important thing was no longer the pleasure of the moment, that of sharing, exchanging, smiling and laughing. The melody in her heart has changed tone. She wants to eat, to feed herself and to survive, but she can no longer do so. Her stomach has become too narrow and can’t take it anymore, so it’s on strike. It sets its terms and may not accept a return to the past, a return to the pleasure of the table where it was good to talk, have a drink, and taste all those prepared dishes that smelled so good in the home kitchen.
She doesn’t want to eat anymore, but hope is there, right there, in her.
Like Prévert’s duck:
« She says no with her head
She says yes with his heart
but she’s not quite saying yes to what she likes yet.
…she’s up, still up!
and on the blackboard of her misfortune
with her little adult hand as a child
she’s trying to clumsily draw the face of happiness. »
Pour Pauline...
John Ibonoco
Bonjour John, si tu savais…. j’ai connu et je connais encore hélas, (une de mes filles), rien à ajouter à ton texte, j’en pleure! bisous et bonne journée MTH
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Bonjour Marie,
Je pense que l’on a deux filles assez semblables Marie. Il y a des périodes difficiles voire très difficiles mais avec le temps et de l’aide, les choses peuvent s’améliorer 😊.
Bisous Marie, sèche tes larmes 😉.
Bonne soirée
John
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Triste histoire, mais joliment racontée!
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Merci Marie-Christine
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Fragile, si fragile…
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Oui, une douce fragilité qui vient inquiéter durablement les parents.
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On se sent tant démuni face à la détresse de nos enfants.
Amitiés John
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C’est exactement cela : démunis, seuls, perdus…
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C’est exactement cela : démunis, seuls, perdus…
Merci Laurence
Amitiés
John
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Se détourner de son assiette, se détourner de sa vie…
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Bonne soirée
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Merci, idem !
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Une bien triste situation, en effet, hélas !
Bonne journée,
Amitiés 😥
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Bonjour Colette,
Heureusement, les choses s’arrangent au fil du temps
Belle journée à toi 😊
Amitiés
John
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Expérience vécue, et complexe car c’est un mode de vie qu’on ne réussit pas à avaler, surtout quand on a un psychisme différent de celui de son entourage.
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que c’est difficile ce sentiment d’impuissance quand on est des parents aimants !
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C’est ce sentiment d’impuissance qui est terrible. Et ne pas savoir quoi faire, comment faire qui contacter… Heureusement, dans mon cas, la situation s’est améliorée mais il a fallu agir. Cette fois-ci, j’ai moins ressenti ce sentiment d’impuissance mais le stress était encore là depuis longtemps.
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ces stress laissent des fêlures indélébiles…….. même quand tout s’arrange (fort heureusement) on a ce ressenti et ce « poids » difficile à trimbaler…… bonne nuit John, la vie est loin d’être un long fleuve tranquille !
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Bonne nuit Hélène,
Tu as raison. Cela fait à présent delà longtemps que je suis marqué au fer rouge du stress. Mais ainsi va la vie. Le tout étant peut-être de savoir comment vivre avec ces fêlures et les dépasser pour en faire quelque chose de positif.
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Je suis très touchée par tes mots John..
Merci
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Merci, j’apprécie sincèrement les tiens.
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Profound writing! The words reach deeply into my soul as a writer. Are these your words John?
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Yes, those are my words. This is a text I wrote for my daughter.
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John, thanks for sharing. I enjoyed every word, and your daughter has been truly blessed with your prose.
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Thank you very much my friend. Your words touch me. Excellent evening John
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C’est terrible d’être impuissant face à cette maladie !
Un texte touchant, triste …
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Merci de vos mots. C’est en effet une situation qui vous glisse entre les doigts comme du sable fin.
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