Buddy time! – Le temps des copains !

(réédition)

« Une fois n’est pas coutume… Il y a des mots, ces mots, ces petits mots qui nous viennent de loin. Il y a ces émotions et tous ces petits moments de vie, ces fragments insignifiants de destin quasi invisibles à l’oeil nu mais que l’on a envie de partager de temps à autre, de ressortir pour les aérer un peu afin que l’oubli n’efface pas les souvenirs d’une époque révolue, afin que l’oubli ne les engloutisse pas à tout jamais.  »

John Ibonoco

Stranglers – always the sun

LE TEMPS DES COPAINS

A mon ami Christophe

C’était il y a déjà bien longtemps au siècle passé…

Un autre temps où les vents d’automne aux saveurs tièdes et humides emportaient la petite feuille encore verte tombée du grand tilleul au tronc solide de la cour d’école, loin, très loin dans les airs, bien au-dessus des rêveries de mer, de vacances et de sable d’un été encore chaud de ces petites têtes se tortillant sur leur banc d’écolier alors qu’elles tentent de résoudre un problème de fuite d’eau d’une baignoire et qu’il est à peine quatorze heures. L’après-midi sera long, interminable, se renouvelant ainsi sans cesse de semaine en semaine depuis la rentrée scolaire de la mi-septembre… mais l’après-midi sera beau et bon parce que tous les copains sont là pendant la récréation avec leurs histoires drôles, leurs blagues à deux balles, leurs sacs de billes, revêtus de leur blouse parfois un peu trop grande pour leurs petits corps qui ne demandent qu’à grandir sous le soleil et le sourire d’une vie qui a éclos il y a peu…

Une autre époque, insouciante, délicieuse et colorée aux parfums de ces matins où il suffisait de respirer la fraîcheur de l’air à pleins poumons pour se sentir vivant, juste vivant, de la tête aux pieds, sans questions ni compromis, sans colère ni haine, juste vivant le sourire aux lèvres, l’âme légère, le cœur en émoi pour un petit rien, le bleu d’un regard furtif qui disparaît à jamais, la chaleur de la paume d’une main enserrant quelques instants un bras timide, un premier rendez-vous, un premier baiser sur un front qui aujourd’hui encore résonne comme un écho dans la nuit de mes souvenirs…

Voilà le printemps ! Voilà le printemps du haut de ses dix-sept ou dix-huit ans, frétillant au premier battement d’aile de l’hirondelle et rêvant de prendre son envol en direction de la cour des grands… mais il est encore trop tôt, bien trop tôt, patience petit homme ! Et la patience, elle, ne sait pas attendre, alors tous les jours à chaque intercours, ça discute ferme entre potes, ça fomente des coups d’épée dans l’eau, ça trame, ça fume une clope, ça discute dur, ça parle de la sortie du prochain week-end ; et le soir venu, tout ce petit beau monde rentre bien sagement du lycée pour retrouver le chaos de sa chambre, les bouquins de cours de la veille encore par terre à côté des chaussettes sales, des pantalons froissés et des caleçons qui ne demandent qu’à être lavés. Sur la platine, un trente-trois tours des Stanglers tourne nonchalamment et laisse monter dans l’atmosphère quelques douces notes pour mélodies félines jusqu’au bout de la nuit, comme « un rêve d’été de minuit en contemplant la pluie… »

Voilà le temps des copains et des amitiés indéfectibles qui vient tranquillement tel un chat, le pas assuré, à la rencontre d’un destin en éveil ne demandant qu’à embrasser le monde, tout le monde de son regard curieux… Voilà le temps de la fraternité dans toute sa beauté et parfois sa stupidité, une fraternité taillée dans le marbre de la chair, loin des frontispices vieillots de la République mais proche du coeur de ses enfants, une fraternité naissante qui unira pour la vie le refrain des matins joyeux aux danses macabres des coups durs de la nuit.

Voici venu le temps des grands secrets de l’existence enfin dévoilés à la jeunesse par les grands auteurs eux-mêmes, voici venu le temps de l’optimisme, le vrai, le seul, l’unique, celui qui te prend énergiquement la main pour te mener à toi-même et qui te murmure à l’oreille cette petite sentence de Nietzsche entendue en philo il y a seulement quelques semaines : « deviens ce que tu es ! ». Et voici enfin venu le temps des grandes rencontres, celles qui nous lient dans le temps et même au-delà parce que tu le ressens au fond de toi, tout au fond, ce sentiment très fort, ce lien du sang qui n’est pourtant pas fait de sang mais d’amitié.

L’amitié ? Cette belle chose née de l’instinct, de l’émotion, du coeur et de la rencontre de l’autre, de celui ou de celle qui ne pensait même pas croiser ton chemin ce matin-là alors qu’il prenait ce bus des transports en commun rouge et blanc, bondés de travailleurs, d’étudiants et de lycéens pour venir s’asseoir à la même table que toi, sur la chaise d’à côté, au deuxième ou troisième rang de la classe, en face du tableau noir tenu par un prof d’anglais en vieux costard gris et à la calvitie déjà très avancée. Alors, ce jour-là, à ce moment-là très précis, l’amitié, cette petite chose presque invisible pour l’oeil, venait de naître en silence dans la classe d’un vieux lycée public de Lyon 8ème, une toute petite chose qui grandira au fil des jours, des semaines puis des années laissant ainsi germer un peu de joie, des rires, des bons moments et une solidarité à toute épreuve…

John Ibonoco

« Once is not customary… There are words, these words, these little words that come to us from afar. There are these emotions and all these little moments of life, these insignificant fragments of destiny almost invisible to the naked eye but that we want to share from time to time, to take them out to air them out a little so that oblivion doesn’t erase the memories of a bygone era, so that oblivion doesn’t swallow them up forever. « 

John Ibonoco

Stranglers – always the sun

THE TIME OF THE BUDDIES

To my friend Christophe

That was a long time ago in the last century…

Another time when the warm and humid autumn winds carried the little green leaf that fell from the big lime tree to the solid trunk of the schoolyard, far, far away in the air, well above the sea, holiday and sand reveries of a still warm summer of these little heads squirming on their school bench as they try to solve a water leak problem from a bathtub and it is only fourteen hours away. The afternoon will be long, endless, renewing itself constantly from week to week since the beginning of the school year in mid-September… but the afternoon will be beautiful and good because all the friends are there during recess with their funny stories, their two-bit jokes, their marble bags, dressed in their blouse sometimes a little too big for their little bodies that just want to grow up under the sun and the smile of a life that has recently begun…

Another era, carefree, delicious and colourful with the scents of those mornings when all you had to do was breathe the freshness of the air with your lungs to feel alive, just alive, just alive, from head to toe, without questions or compromises, without anger or hatred, just living with a smile on your lips, a light soul, the warmth of the palm of one hand enclosing a timid arm for a few moments, a first appointment, a first kiss on a forehead that still resonates today like an echo in the night of my memories…

Spring is here! Here comes spring from the top of his seventeen or eighteen years old, wriggling at the first wing-beat of the swallow and dreaming of taking off towards the court of the great… but it is still too early, far too early, patience, little man! And patience doesn’t know how to wait, so every day on every intermission, it’s a good discussion between friends, it foments swordplay in the water, it weave, it smokes a cigarette, it talks hard, it talks about the release of the next weekend; and in the evening, all this beautiful little people come home quietly from school to find the chaos of their room, the school books from the previous day still on the floor next to dirty socks, crumpled trousers and boxers that just need to be washed. On the turntable, a thirty-three laps of the Stanglers turn nonchalantly and let rise in the atmosphere some sweet notes for feline melodies until the end of the night, like « a midnight summer dream when contemplating the rain… »

Here is the time for friends and unfailing friendships that quietly comes like a cat, the step assured, to meet an awakening destiny just waiting to embrace the world, everyone with his curious look…. This is the time of brotherhood in all its beauty and sometimes stupidity, a brotherhood carved in the marble of the flesh, far from the old frontispieces of the Republic but close to the hearts of its children, a nascent brotherhood that will unite for life the chorus of joyful mornings with the macabre dances of the hard blows of the night.

Here comes the time of the great secrets of existence finally revealed to youth by the great authors themselves, here comes the time of optimism, the true, the only, the only, the only, the one who takes you energetically by the hand to lead you to yourself and who whispers in your ear that little Nietzsche sentence heard in philosophy only a few weeks ago: « become what you are! ». And here finally comes the time of great encounters, those that bind us in time and even beyond because you feel it deep within you, deep down, that very strong feeling, that bond of blood that is not made of blood but of friendship.

Friendship? This beautiful thing born of instinct, emotion, heart and meeting the other, the one who didn’t even think he or she would cross your path that morning when he or she was taking that red and white public transit bus full of workers, students and high school students to come and sit at the same table as you, on the next chair, in the second or third row of the class, in front of the blackboard held by an English teacher in an old grey suit and already very advanced baldness. So, on that day, at that very precise moment, friendship, that little thing almost invisible to the eye, had just been born in silence in the classroom of an old public high school in Lyon 8th, a very small thing that will grow over the days, weeks and years, thus allowing a little joy, laughter, good times and solidarity to sprout….

John Ibonoco

14 commentaires Ajouter un commentaire

  1. Joli texte sur les souvenirs…

    Aimé par 1 personne

    1. ibonoco dit :

      Merci Marie-Christine 🎄

      Aimé par 2 personnes

  2. marie dit :

    Bonjour John; que c’est agréable de te lire, tu as partagé là des souvenirs de garçons , puis de jeune homme, je pourrais faire pareil avec nous les filles, qui regardions de loin ces gamins qui déjà pour quelques unes nous faisaient rêver. Nous n’avions pas les mêmes préoccupations quoique..Le baiser sur le front, un très doux souvenir, je le sens encore , on avait 15 ans , le grand Amour à n’en pas douter.! Et , moi qui ne fume pas, j’ai essayer deux ou trois fois mais c’était juste pour frimer , j’aimais pas. Merci , j’ai vraiment apprécié ton texte, Bisous bon après-midi MTH

    Aimé par 1 personne

    1. ibonoco dit :

      Bonjour Marie,
      Merci de tes mots, ils sont très agréables à lire. 😉
      J’espère que tu partageras tes souvenirs dans un futur article. Tu le fais déjà un peu ici et c’est bien écrit. Il ne te reste plus qu’à poursuivre sur ta lancée .
      Je suis certain que ce sera passionnant à lire.
      Bisous Marie 🎄🎄🎄
      Amitiés
      John

      Aimé par 2 personnes

  3. chris38000 dit :

    Merci mon Pote ¦
    A bientôt. Sur d’autres chemin. Sans calvitie , bien sûr;

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    1. ibonoco dit :

      A bientôt mon ami. A très bientôt

      J’aime

  4. Très touchant ce texte, merci John pour ce joli partage 😊

    Aimé par 1 personne

    1. ibonoco dit :

      Merci d’avoir apprécié 😊

      Aimé par 1 personne

  5. Swannaëlle dit :

    Merci John pour ce très beau texte ! Belle fin de soirée 😘🌹

    Aimé par 1 personne

    1. ibonoco dit :

      Bonjour Swannaëlle,
      C’est toujours un plaisir que d’avoir de tes nouvelles.
      Amitiés 🎄🎄🎄
      John

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  6. colettedc dit :

    Bonjour John,
    Je l’💖beaucoup, ce texte avec tous ces bons souvenirs qu’il transporte ! C’est si bon de t’y lire !!!
    Bon et beau mercredi,
    Amitiés 😘🎄💖

    Aimé par 1 personne

    1. ibonoco dit :

      Bonjour Colette,
      Merci sincèrement de tes mots. j’espère pouvoir en écrire d’autres du même genre. Mes souvenirs sont une bonne source d’inspiration en ce qui me concerne. Passe une belle journée… On y est presque. Noël approche à grands pas.
      Amitiés Colette 🎄🎄🎄
      John

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  7. Merci John pour ce très beau texte et son accompagnement musical. Nous avons tous des souvenirs de jeunesse communs.
    Amitiés.
    Jean-Daniel

    Aimé par 1 personne

    1. ibonoco dit :

      Bonsoir Jean-Daniel,
      Merci de tes mots et appréciations.
      Tu as raison, nous avons tous des souvenirs communs.
      C’est notamment pour cette raison que j’essaie de me les rappeler, de les faire vivre en les partageant. Le temps passe vite – ou c’est nous qui passons…
      Belle soirée Jean-Daniel 🙂🎄
      John

      J’aime

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