Prologue
« Les années passent, passent et repassent sur nos visages, nos corps, creusant des sillons sur notre peau à grands coups de burins et délavant nos cheveux pour n’en faire qu’un mélange de blanc, de gris où seuls quelques petits mèches noires persistent comme si la jeunesse ne voulait toujours pas abdiquer.
Alors affleurent les souvenirs d’un autre temps où l’amitié était omniprésente, où l’insouciance était quotidienne et porteuse de magie, et projetait de belles images sur un avenir qui serait – à tous les coups – magnifiques.
Pas de tristesse mais quelques chagrins d’amour ; pas de pleurs mais des larmes de joie…
Des parents présents, des amis, copains et potes rêvant d’aventures, de projets musicaux ou professionnels, tout était en suspension dans l’air. Il n’y avait qu’à tendre la main pour s’en saisir et faire un voeu pour leur réalisation…
Aujourd’hui, les illusions s’en sont allées sur le chemin du temps. Ne demeurent que quelques rêves et les souvenirs.«
John Ibonoco
(Réédition)
LE TEMPS DES COPAINS
A mon ami Christophe
C’était il y a déjà bien longtemps au siècle passé…
Un autre temps où les vents d’automne aux saveurs tièdes et humides emportaient la petite feuille encore verte tombée du grand tilleul au tronc solide de la cour d’école, loin, très loin dans les airs, bien au-dessus des rêveries de mer, de vacances et de sable d’un été encore chaud, de ces petites têtes se tortillant sur leur banc d’écolier alors qu’elles tentent de résoudre un problème de fuite d’eau d’une baignoire et qu’il est à peine quatorze heures. L’après-midi sera long _ interminable, se renouvelant ainsi sans cesse de semaine en semaine depuis la rentrée scolaire de la mi-septembre… mais l’après-midi sera beau et bon parce que tous les copains sont là pendant la récréation avec leurs histoires drôles, leurs blagues à deux balles, leurs sacs de billes, revêtus de leur blouse parfois un peu trop grande pour leurs petits corps qui ne demandent qu’à grandir sous le soleil et le sourire d’une vie qui a éclos il y a peu…
Une autre époque, insouciante, délicieuse et colorée aux parfums de ces matins où il suffisait de respirer la fraîcheur de l’air à pleins poumons pour se sentir vivant, juste vivant, de la tête aux pieds, sans questions ni compromis, sans colère ni haine, juste vivant le sourire aux lèvres, l’âme légère, le cœur en émoi pour un petit rien, le bleu d’un regard furtif qui disparaît à jamais, la chaleur de la paume d’une main enserrant quelques instants un bras timide, un premier rendez-vous, un premier baiser sur un front qui aujourd’hui encore résonne comme un écho dans la nuit de mes souvenirs…
Voilà le printemps ! Voilà le printemps du haut de ses dix-sept ou dix-huit ans, frétillant au premier battement d’aile de l’hirondelle et rêvant de prendre son envol en direction de la cour des grands… mais il est encore trop tôt, bien trop tôt, patience petit homme ! Et la patience, elle, elle ne sait pas attendre, alors tous les jours à chaque intercours, ça discute ferme entre potes, ça fomente des coups d’épée dans l’eau, ça trame, ça fume une clope, ça discute dur, ça parle de la sortie du prochain week-end ; et le soir venu, tout ce petit beau monde rentre bien sagement du lycée pour retrouver le chaos de sa chambre, les bouquins de cours de la veille encore par terre à côté des chaussettes sales, des pantalons froissés et des caleçons qui ne demandent qu’à être lavés. Sur la platine, un trente-trois tours des Stanglers tourne nonchalamment et laisse monter dans l’atmosphère quelques douces notes pour mélodies félines jusqu’au bout de la nuit, comme « un rêve d’été de minuit en contemplant la pluie… ».
Voilà le temps des copains et des amitiés indéfectibles qui vient tranquillement tel un chat, le pas assuré, à la rencontre d’un destin en éveil ne demandant qu’à embrasser le monde, tout le monde de son regard curieux… Voilà le temps de la fraternité dans toute sa beauté et parfois sa stupidité, une fraternité taillée dans le marbre de la chair, loin des frontispices vieillots de la République mais proche du coeur de ses enfants, une fraternité naissante qui unira pour la vie le refrain des matins joyeux aux danses macabres des coups durs de la nuit.
Voici venu le temps des grands secrets de l’existence enfin dévoilés à la jeunesse par les grands auteurs eux-mêmes, voici venu le temps de l’optimisme, le vrai, le seul, l’unique, celui qui te prend énergiquement la main pour te mener à toi-même et qui te murmure à l’oreille cette petite sentence de Nietzsche entendue en philo il y a seulement quelques semaines : « deviens ce que tu es ! ». Et voici enfin venu le temps des grandes rencontres, celles qui nous lient dans le temps et même au-delà parce que tu le ressens au fond de toi, tout au fond, ce sentiment très fort, ce lien du sang qui n’est pourtant pas fait de sang mais d’amitié.
L’amitié ? Cette belle chose née de l’instinct, de l’émotion, du coeur et de la rencontre de l’autre, de celui ou de celle qui ne pensait même pas croiser ton chemin ce matin-là alors qu’il prenait ce bus des transports en commun rouge et blanc, bondés de travailleurs, d’étudiants et de lycéens pour venir s’asseoir à la même table que toi, sur la chaise d’à côté, au deuxième ou troisième rang de la classe, en face du tableau noir tenu par un prof d’anglais en vieux costard gris et à la calvitie déjà très avancée. Alors, ce jour-là, à ce moment-là très précis, l’amitié, cette petite chose presque invisible pour l’oeil, venait de naître en silence dans la classe d’un vieux lycée public de Lyon 8ème, une toute petite chose qui grandira au fil des jours, des semaines puis des années laissant ainsi germer un peu de joie, des rires, des bons moments et une solidarité à toute épreuve…
John Ibonoco
Prologue
« The years come and go over our faces and bodies, chiseling grooves into our skin and washing out our hair to make a mixture of white and gray, with only a few small black streaks remaining, as if youth still didn’t want to give up.
Memories of a time when friendship was omnipresent, when insouciance was daily and magical, and projected beautiful images of a future that would – every time – be magnificent.
No sadness but a few heartbreaks; no tears but tears of joy…
With parents present, friends and pals dreaming of adventures, musical or professional projects, everything was suspended in the air. All you had to do was reach out your hand and make a wish for it to come true…
Today, illusions have faded away on the path of time. Only dreams and memories remain. »
John Ibonoco
THE TIME OF THE BUDDIES
To my friend Christophe
It was a long time ago in the last century…
Another time, when the warm, damp autumn winds carried the little green leaf that had fallen from the big, sturdy lime tree in the schoolyard, far, far away into the air, far above the daydreams of the sea, the vacations and the sand of a summer still warm from those little heads squirming on their school benches as they try to solve a problem with a leaking bathtub, and it’s barely two o’clock. The afternoon will be long – interminable, repeating itself week after week since the start of the school year in mid-September… – but the afternoon will be beautiful and good because all the friends are there during recess with their funny stories, their two-bit jokes, their bags of marbles, dressed in their smocks that are sometimes a little too big for their little bodies, which are just waiting to grow under the sun and the smile of a life that has only just begun to blossom…
Another era, carefree, delicious and colorful, with the scent of those mornings when all you had to do was breathe in the fresh air at the top of your lungs to feel alive, just alive, from head to toe, without questions or compromises, without anger or hatred, just alive with a smile on your lips and a light soul, the heart in turmoil over a little thing, the blue of a furtive glance that disappears forever, the warmth of the palm of a hand embracing a shy arm for a few moments, a first date, a first kiss on the forehead that today still echoes in the night of my memories. ..
Here comes spring! Seventeen- or eighteen-year-old spring, wriggling at the first flap of the swallow’s wing, dreaming of taking off for the big leagues… but it’s still far too early, far too early, patience, little man! And patience doesn’t know how to wait, so every day between classes, there’s a lively discussion between buddies, a lot of plotting, a lot of smoking, a lot of tough talk, a lot of talk about the next weekend’s outing; And in the evening, the whole gang wisely returns home from school to the chaos of their rooms, the previous day’s course books still on the floor next to dirty socks, wrinkled pants and underpants begging to be washed. On the turntable, a Stanglers thirty-three rpm spins nonchalantly and lets a few soft notes of a feline melody rise into the atmosphere, a melody that will go on until the end of the night, like “a midnight summer dream contemplating the rain…”.
It’s a time of friendships and unshakeable friendships, a time that comes quietly like a cat, with confident steps, to meet an awakening destiny eager to embrace the world, the whole world, with its curious gaze… This is the time of fraternity in all its beauty and sometimes stupidity, a fraternity carved in the marble of the flesh, far from the old-fashioned frontispieces of the Republic but close to the hearts of its children, a nascent fraternity that will unite for life the refrain of joyful mornings with the macabre dances of the hard knocks of the night.
Now is the time for the great secrets of existence, finally revealed to young people by the great authors themselves; now is the time for optimism, the real optimism, the only optimism, the only optimism, the one that takes you by the hand and leads you to yourself, whispering in your ear that little Nietzsche phrase heard in philosophy class just a few weeks ago: « Become what you are! And now, at last, it’s time for the great encounters, the ones that bind us together over time and even beyond, because you feel it deep down inside, this very strong feeling, this bond of blood that is not made of blood but of friendship.
Friendship? That beautiful thing born of instinct, emotion, the heart and the encounter with the other person, the one who didn’t even think he or she would cross your path that morning as he or she took that red and white public transport bus crowded with workers, students and high-school pupils to come and sit at the same table as you, on the chair next to you, in the second or third row of the class, opposite the blackboard held by an English teacher in an old grey suit and already very bald. So, on that day, at that very moment, friendship, that little thing almost invisible to the eye, had been silently born in the classroom of an old public high school in Lyon 8ème, a tiny little thing that would grow over the days, weeks and years, giving birth to a little joy, laughter, good times and a solidarity that would stand the test of time…
John Ibonoco
Une belle réflexion, merci
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Merci mon ami.
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Une très belle ode à l’amitié, à la jeunesse, à la vie John …
💙
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Oui Miss Juliette. 🌞🌞
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Love this
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Thank you my friend 😉
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Very nice post!
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Thank you
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Très beau texte…
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Merci Domi
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😊
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Que de bons souvenirs d’hier. J’ai beaucoup aimé! Amitiés
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Merci de tes mots mon ami.
John
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