Don’t waste your time anymore!

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ELLE PREND SON TEMPS

Aujourd’hui, elle prend son temps…

Elle prend juste un petit bout de temps qu’elle vient de ramasser à même le sol et qu’elle glisse très discrètement dans la poche de son épais manteau gris, bien à l’abri des tourments quotidiens. Enfin elle en tient un ! Et elle ne le perdra pas celui-là ni le gaspillera. Le regard vert, pétillant, elle commence à comprendre et c’est facile. Quand on a la chance de découvrir un petit bout de temps, tout neuf, tout propre, pas encore ridé, craquelé par les morsures du soleil d’une vie s’éloignant peu à peu de son zénith, alors il faut le serrer très fort contre son cœur et ne pas le laisser s’échapper. Le serrer très fort, très très fort contre son cœur, le réchauffer de chacun de ses battements réguliers et se dire que c’est une chance de pouvoir enfin ralentir un peu le pas, respirer plus lentement et profondément, s’apaiser parce qu’on a enfin le temps de prendre son temps.

Mais parfois, la pêche est moins bonne, la chance n’est pas au rendez-vous. Ses doigts fins engourdis et rougis par le froid n’ont pu se saisir que d’un tout petit morceau de temps tout ébréché par les rafales d’un dur vent hivernal, un vent glacial régnant sans partage sur la ville et qui la bouscule sans ménagement à coup de rafales dans le dos, dès potron-minet, quand elle marche d’un pas pressé sur les pavés encore humide et glissant de sa rue. Et la rue Saint-Hélène est terrible en cette période, elle n’invite pas le passant à flâner distraitement et encore moins à la rêverie. La rue Victor Hugo d’un côté, la belle pierre d’Ainay et ses remparts, la place Antoine Vollon d’un autre côté, la Saône s’en allant confluer après Perrache, rien ne peut arrêter l’hiver s’engouffrant dans cette artère où froid et humidité se partagent chaque pavé…

Alors, avec ce tout petit morceau, ce petit bout de temps tout ébréché, tout cassé, poussière d’étoiles dont Chronos s’est débarrassé, il lui faudra faire toute une journée, une longue journée de labeur et supporter le poids d’un stress toujours plus inquiétant, le poids des heures qui ralentissent au fur et à mesure que la journée avance.

Mais aujourd’hui, elle prend son temps… elle a le temps. Elle vient juste de ramasser à même le sol un p’tit bout de temps, tout beau, tout propre et elle l’a glissé très discrètement dans la poche de son épais manteau gris, bien à l’abri des tourments quotidiens. Enfin elle en tient un ! Tout en le serrant très fort contre elle, son regard vert s’illumine. Il est temps pour elle de prendre son temps.

Ibonoco

SHE TAKES HER TIME

Today, she takes her time…

She just takes a little while, which she has just picked up off the ground and slips very discreetly into the pocket of her thick grey coat, well protected from the daily torments. Finally she’s got one! And she won’t lose that one or waste it. The green, sparkling look, she starts to understand and it’s easy. When you have the chance to discover a little while, brand new, clean, not yet wrinkled, cracked by the bites of the sun of a life gradually moving away from its zenith, then you have to hold it very tight against your heart and not let it escape. Hold it very tightly, very very tightly against your heart, warm it up with each of your regular beats and tell yourself that it’s a chance to finally slow down a little, breathe more slowly and deeply, calm down because you finally have time to take your time.

But sometimes the fishing is not as good, the luck is not there. Her thin fingers numb and reddened by the cold could only grasp a very small piece of time chipped by the gusts of a harsh winter wind, a icy wind that reigns supreme over the city and that pushes her mercilessly with gusts of wind in the back, from early in the morning, when she walks with a hurried step on the cobblestones still wet and slippery from her street. And rue Saint-Hélène is terrible at this time of year, it does not invite passers-by to stroll around distractedly and even less to dream. The rue Victor Hugo on one side, the beautiful stone of Ainay and its ramparts, the place Antoine Vollon on the other side, the Saône river flowing into Perrache, nothing can stop winter rushing into this artery where cold and humidity share each paved area…

So, with this tiny little piece, this little piece of time all chipped, all broken, all broken, star dust that Chronos has got rid of, he will have to do a whole day, a long day of work and bear the weight of an ever more worrying stress, the weight of the hours that slow down as the day progresses.

But today, she takes her time… she has time. She has just picked up a little something on the ground for a while, all beautiful, all clean and she has slipped it very discreetly into the pocket of her thick grey coat, well protected from the daily torments. Finally she’s got one! While holding him very tightly against her, her green eyes light up. It’s time for her to take her time.

Ibonoco

33 commentaires Ajouter un commentaire

  1. C’est très beau, très poétique, ce que tu as écrit là, John !
    Bonne journée à toi.

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    1. ibonoco dit :

      Merci Jean-Louis,
      J’essaie toujours un peu de poésie dans mes textes.
      Et j’apprécie vraiment ton compliment 😊
      Bonne journée également’
      John

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  2. iotop dit :

    Bon jour John,
    Le temps approprié … le temps semble offert aux locataires humains pour du bon temps, parfois … 🙂
    Un texte, comme le dit Jean-Louis, poétique au relief de savourer cette recherche d’un bonheur enfin trouvé : « Il est temps pour elle de prendre son temps » … mais n’est-ce pas aussi celle du temps de la fin … « temps » attendu ?
    Max-Louis

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    1. ibonoco dit :

      Bonjour Max-Louis,
      Il est de temps qu’elle prenne son temps, qu’elle le savoure avant que le dernier temps, celui de la fin advienne.
      Belle journée Max-Louis
      John

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      1. iotop dit :

        Bonne fin de soirée, à toi, John 🙂

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        1. ibonoco dit :

          Merci Max-Louis 😊

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    2. Comme le disait l’ecclésiaste « Omnia tempus habent », ou encore « un temps pour chaque chose ». Un temps pour être, un temps pour aimer, un temps pour vivre, un temps pour mourir…
      Tiens, ça me rappelle un fameux titre des Portes, chanté par son leader Jim MORRISON.

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      1. ibonoco dit :

        Indeed my Friend Jean-Louis.

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  3. juliette dit :

    C’est très très joli John …et la musique est bonne !!!
    😊

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    1. ibonoco dit :

      Merci Juliette,.
      J’adore ce morceau 😊

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  4. Dominique dit :

    Ce qu’il y a de bien avec le temps que l’on perd, c’est qu’il profite à quelqu’un d’autre !

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    1. ibonoco dit :

      Il faut espérer qu’il soit utile à d’autres. 😊

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  5. Dominique dit :

    Il y a des gens qui préfèrent ramasser des petits bonheurs…

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    1. ibonoco dit :

      Chacun ramasse ce qu’il veut et peut…

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  6. charef dit :

    Magnifique prose poétique qui nous donne à réfléchir sur la condition humaine. Merci pour ce joli partage.
    Charef

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    1. ibonoco dit :

      Bonjour Charef,
      Je te remercie pour ta lecture de mon texte .
      Et merci de ta visite également .
      John

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  7. C’est très poétique et original, bravo!

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    1. ibonoco dit :

      Bonsoir Marie-Christine,
      Merci, touché ! 😊
      John

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  8. colettedc dit :

    Que j’♥ ce p’tit bout de temps tout beau tout propre, John ; il me donne le goût d’en cueillir au long de mes journées ! En tout cas, je vais m’exercer c’est certain, à en prendre le temps !!!
    Bon mardi,
    Amitiés♥

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    1. ibonoco dit :

      Bonjour Colette,
      Merci d’apprecier ce petit bout de texte. Il faut s’exercer, tu as raison. En ce qui me concerne, j’ai beaucoup de mal.
      Belle journée
      Amities
      John

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  9. J’aime beaucoup ce texte et ce qu’il dégage. Merci pour le partage de votre écriture.

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    1. ibonoco dit :

      Bonjour Marie-Christine,
      Je vous remercie également d’apprécier mon écriture.
      John

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  10. Un très joli texte. Merci John pour ce beau partage 😊

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    1. ibonoco dit :

      Merci Frédéric. 😊
      John

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  11. michusa dit :

    Excellent ! courir toujours et le temps qui manque pour tout c’est maladie de la fin du XXeme siècle et encore plus de ce nouveau siècle XXI… (et de plus en plus)

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  12. ibonoco dit :

    Et parfois, cela fait du bien de ralentir de temps à autre voire de s’arrêter, de faire autre chose. On n’est plus à la « recherche du temps perdu ». On cherche tout simplement à avoir un peu de temps pour vivre.

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  13. C’est vraiment très beau et poétique ce texte. J’ai cette impression aujourd’hui d’avoir réussi à attraper un de ces petits bout de temps dont tu parles … et ça fait du bien !
    merci John et belle soirée.

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    1. ibonoco dit :

      Bonsoir Catherine,
      Je te remercie bien pour ton compliment sur la poésie que porte ce texte.
      J’essaie d’attraper à la volée quelques petits bouts de temps.comme.tu le.fais.
      Belle soirée Catherine
      Amities 😊
      John

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