I just saw the future

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(Réédition)

Rhythm Is Rhythm – Strings Of Life – 1987


– Dis-moi Jim, parle-moi encore de l’avenir ! Parle-moi de la musique du futur, celle des années 80 à venir, celle d’une ère nouvelle où le rock accueillera dans ses bras grand ouverts la technologie, celle des ordinateurs et des Hommes communiant autour de nouveaux sons pour une jeunesse à la recherche de ses origines dans une transe hypnotique qui durera toute une nuit. Parle-moi de demain et bien plus loin encore, toi qui a su mettre en mouvement et faire danser tous ces jeunes esprits épris de liberté et d’amour… en des temps où grondait la révolte des consciences, la guerre du Vietnam et tant d’autres événements en Europe de l’Est. Dis-moi Jim, raconte-moi ce que tu entrevois pour demain…

– Pour demain ? J’entrevois déjà les prémices impensées des grands changements à venir. Mais ils ne sont pour l’heure que de toutes petites secousses que seule l’oreille avertie peut capter. Dans dix ou quinze ans, ce sera en revanche une vraie révolution mais sans réelle rupture avec le passé, juste un saut technologique en avant, un p’tit bon analogique qui sera suivi par un grand pas de côté numérique. La musique est ainsi faite, elle plonge ses racines dans la nuit des temps pour se donner un présent et un avenir, le blues, le jazz et le rock sont tous les cousins, grands-cousins, frères, sœurs, filles ou fils d’une seule et même famille. Et dans une décennie,  » c‘est probablement ce qui se produira : un gamin brillant va arriver et être populaire. Je peux voir un artiste seul avec beaucoup de bandes magnétiques et de matériel électrique … comme une extension du synthétiseur Moog – un clavier avec la complexité et la richesse d’un orchestre entier, vous savez ? Il y a quelqu’un qui travaille dans un sous-sol, qui invente une toute nouvelle forme musicale…(1969, Rollingstone magazine) » 

Et bientôt, bientôt, très bientôt et seulement une fois que je ne serai plus, un groupe allemand naîtra et se fera appeler Kraftwerk. Avec ses synthétiseurs et ses bandes magnétiques, les membres de cette formation seront considérés par beaucoup comme les pères de la musique électronique et l’on entendra résonner et vibrer ses morceaux jusqu’à Detroit sur la bande FM d’un DJ The Electrifying Mojo dans son émission Midnight Funk… Et alors, la Techno music naîtra. En attendant qu’advienne ce moment, chaque nuit, je fais ce rêve, un peu comme un rêve dans un rêve ou comme une prière qui tournerait en boucle dans ma tête. J’entends cette voix que je connais bien – la mienne – , cette voix d’outre-tombe qui me murmure à l’oreille ce refrain sans fin : « La musique était nouvelle, en chrome poli noir, et elle est venue pendant l’été comme une nuit liquide. Les DJ s ont pris des pilules pour rester éveillés et jouer pendant sept jours. (An American prayer) La musique était nouvelle… la musique était nouvelle et les DJ s ont jouer pendant sept jours… »

A présent, ma voix m’emporte au loin. Mon regard se porte alors du côté de Chicago et du Warehouse club. Les DJ s ont pris les commandes des platines vinyles et deviennent les nouveaux rois de la nuit et de sa fièvre sans fin. Le disco et le funk viennent d’accélérer leur rythme cardiaque à 120 BPM et d’épouser des voix samplées sur des lignes de basse groovy. Ce soir, c’est Frankie Knuckle qui officie en maître incontesté des lieux, de l’air et du dancefloor. La soirée sera chaude. Décidément, les années 80 commencent bien à Chicago… la House music est née… Un nouveau flash, une nouvelle vision de l’avenir me percute. Cette fois-ci, elle me conduit toujours plus loin, toujours plus loin et en avant. On est en 1988 ou 1989, dans une usine désaffectée du nord de Londres. Et moi ? je danse comme un fou au milieu de milliers d’autres personnes le sourire aux lèvres, sur de nouveaux sons acid house jusqu’à l’aube, une aube prometteuse se levant sur un nouveau Summer of love… 

Mais aujourd’hui, tout cela n’existe pas encore et ne se produira peut-être jamais ! Je ne suis certainement qu’un fou ayant trop abusé de l’alcool et qui croit entendre dans le silence de la nuit étoilée des sons venus du futur…  Alors, accoudé au comptoir de mon bar parisien préféré le Rock ‘n’ Roll Circus, je me ressers un dernier whisky histoire de bien dormir avant d’aller me coucher. This is the end.

Ibonoco

Rhythm Is Rhythm – Strings Of Life – 1987

– Tell me, Jim, tell me more about the future! Tell me about the music of the future, the music of the 80’s to come, the music of a new era where rock will welcome technology in its wide open arms, the music of computers and Men communicating around new sounds for a youth in search of its origins in a hypnotic trance that will last a whole night. Tell me about tomorrow and much more, you who knew how to set in motion and make dance all these young spirits in love with freedom and love… at a time when the revolt of consciences, the Vietnam war and so many other events in Eastern Europe were rumbling. Tell me, Jim, what do you see for tomorrow…

– For tomorrow? I can already see the unthinkable beginnings of the great changes to come. But at the moment they are only tiny tremors that only the trained ear can pick up. In ten or fifteen years, on the other hand, it will be a real revolution but without any real break with the past, just a technological leap forward, a little analogical step that will be followed by a big step on the digital side. Music is made in this way, it plunges its roots in the mists of time to give itself a present and a future. Blues, jazz and rock are all cousins, big cousins, brothers, sisters, daughters or sons of the same family. And a decade from now, « That’s probably what’s going to happen: some brilliant kid will come along and be popular. I can see a lone artist with a lot of tapes and electrical … like an extension of the Moog synthesizer — a keyboard with the complexity and richness of a whole orchestra, y’know? There’s somebody out there, working in a basement, just inventing a whole new musical form...(1969, Rollingstone magazine)« . And soon, very soon, and only once I am no longer there, a German band will be born and will be called Kraftwerk. With its synthesizers and magnetic tapes, the members of this band will be considered by many as the fathers of electronic music and their songs will be heard resonating and vibrating all the way to Detroit on the FM tape of a DJ The Electrifying Mojo in his Midnight Funk show… And then Techno music will be born.

Waiting for that moment to come, every night I have this dream, a bit like a dream within a dream or like a prayer that goes round and round in my head. I hear this voice that I know well – my own -, this voice from beyond the grave whispering in my ear this endless refrain: « The music was new, in black polished chrome, and it came during the summer like a liquid night. The DJs took pills to stay awake and play for seven days. (An American prayer) The music was new… the music was new and the DJs played for seven days… »

Now my voice carries me away. My gaze is now on Chicago and the Warehouse Club. The DJs have taken over the vinyl turntables and become the new kings of the night and its endless fever. Disco and funk had just accelerated their heart rate to 120 BPM and married sampled vocals to groovy bass lines. Tonight, Frankie Knuckle is the undisputed master of the place, the air and the dancefloor. It’s gonna be a hot night. Decidedly, the Eighties begin well in Chicago… the House music was born… A new flash, a new vision of the future strikes me. This time, it takes me further and further and further ahead. We are in 1988 or 1989, in a disused factory in North London. And me? I dance like a madman among thousands of other people with a smile on my face, to new acid house sounds until dawn, a promising dawn rising on a new Summer of love.

But today, all this does not yet exist and may never happen! I’m probably just a crazy person who has abused alcohol too much and who thinks he can hear sounds from the future in the silence of the starry night… So, leaning against the counter of my favourite Parisian bar, the Rock ‘n’ Roll Circus, I pour myself one last whisky to make sure I get a good night’s sleep before going to bed. This is the end.

Ibonoco

9 commentaires Ajouter un commentaire

  1. Jaskiers dit :

    Super article ! Je ne connaissais pas cette interview de Jim et votre article est superbement bien écrit !
    Merci pour le partage !

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    1. ibonoco dit :

      Merci,
      j’apprécie beaucoup. C’est un plaisir.
      Belle soirée.
      John

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  2. princecranoir dit :

    Toujours un plaisir de relire ce texte. Je t’accompagne au RnR Circus !

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    1. ibonoco dit :

      Merci à toi. Il faudrait que j’en écrive d’autres sur la musique électronique. Allez hop ! on sort c’est la rave.

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      1. princecranoir dit :

        I had a rave! 😉

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      2. Paquerite dit :

        Oui!!!!
        Plein d’autres et oui un article sur la musique électronique, en ce moment je me rince les oreilles avec plein de nouveaux sons formidables, je plane.
        Merci pour ton article, magnifique, inspiré et bien « tripant  » 😉
        Des bisous John

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        1. ibonoco dit :

          J’en ferai… même si en ce moment le temps me manque. Il faut trouver l’inspiration.
          Merci beaucoup de tes mots, cela me fait plaisir.
          Des bisous
          John

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        2. Paquerite dit :

          Le temps et l’inspiration sont peut-être bien les nerfs de la création. C’est pas toujours facile, et je partage ta pensée …
          Bonne journée à toi John
          Des bisous
          Corinne

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        3. ibonoco dit :

          Merci Corinne,
          On va tenter quelque chose 😉. Il me faut un peu de temps.
          Bises et amitiés
          John

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